Martin Luther King, la religion et Dieu

 

Martin Luther King est le géant humain que l’on sait, tombé en 1968 sous les balles d'un meurtrier inconnu. Ce que l'on sait un peu moins, c'est que toute l’énergie de son combat, il l’a puisée dans sa foi en Dieu. Aussi, son œuvre est de nos jours circonscrite à l’antiracisme, qui procède en réalité d’une réflexion spirituelle plus large. C'est un fait: en s’universalisant, l'enseignement du pasteur King a été séparé de sa matrice religieuse, laquelle nous aide pourtant à comprendre le cheminement de sa pensée, jusqu'à l'aboutissement humaniste que l'on connaît.

 

Il serait temps de réinvestir la teneur proprement théologique de ses discours, qui a trop longtemps survécu dans l’ombre.

 

Le mal porte en soi le germe de sa propre destruction" (Martin Luther King, La force d'aimer, 1964)

 

Martin Luther King était avant tout pasteur, prêcheur, apôtre d’un Dieu qu’il proclamait devant tous. Son rapport à sa propre confession était critique ; ainsi, il rejetait particulièrement l’idée protestante de la corruption radicale de l’homme à la suite du péché originel, se ralliant implicitement sur ce point à la conception catholique, plus optimiste (suite au péché originel, l'homme demeure tout de même capable de s'élever en partie par lui-même jusqu'à Dieu. Ce n'est plus le cas dans le protestantisme, où seule la grâce de Dieu peut le "repêcher") 

 

 Les doctrines de la justification par la foi et du sacerdoce universel des croyants sont des principes de base que nous, protestants, devons toujours professer, mais la doctrine de la Réforme sur la nature humaine a exagéré la corruption de l’homme. La Renaissance était trop optimiste, la Réforme fut trop pessimiste » (Martin Luther King, La force d’aimer, 1964)

 

C'est une vérité quelque peu dérangeante: Martin Luther King croyait fermement au péché originel, en la "culpabilité de l'homme", au sens métaphysique. Cette conviction n'avait rien d'obscurantiste ou de passéiste en soi. Elle signifiait simplement, et notre époque actuelle l'a largement oublié, qu'étant tous "pécheurs", c'est-à-dire limités, aucun peuple, aucune race sur cette terre ne peut se prévaloir d'une quelconque supériorité naturelle sur les autres. Le sens du péché originel est fondamentalement celui-ci, en dépit des interprétations théologiques qui incurvèrent trop souvent son intelligibilité, en sexualisant la Faute.

 

Biographies de famille: service Mont des lettres

 

Les générations actuelles sont tributaires de ce malentendu historique, qui nous laisse assimiler le péché originel à une sorte d'élucubration cléricale arriérée. Triste ironie: notre parti-pris "progressiste" résulte de cette déformation, on la "croit" tellement qu'on n'y perçoit plus que le naturel du péché originel. Martin Luther King, lui, s'était renseigné. Le péché originel disait l'unité, la solidarité fondamentale de l'humanité entière, toute absorbée dans l'imperfection naturelle; dès lors, impossibilité d'établir de quelconque race pure sur cette terre.

 


 Enseignant à juste titre la culpabilité de l’homme et son impuissance à se sauver lui-même, la Réforme (protestante) affirme à tort que l’image de Dieu avait été complètement détruite en l’homme. Ceci conduit au concept calviniste de la corruption totale de l’homme et à une résurgence de l’idée terrible de la damnation des enfants » (Martin Luther King, La force d’aimer, 1964)

 

Pierre-André Bizien

 


 

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