Milkipress : David, tu vas te produire avec ton équipe lors d’un concert de Rock à Paris, en janvier 2020. Peux-tu nous évoquer quelques détails concernant cette performance très prochaine (ce que tu vas peut-être jouer, quel ton vas-tu imprimer sur la scène, etc) ?
David : notre intention est de jouer, ce 1er février au Cirque Electrique, le set le plus puissant et le plus efficace possible. On vient avec toute notre équipe (lighteux, sondier, caméraman, merchandising...) ; l'idée est donc de faire bonne impression. On compte jouer une bonne heure, en rendant notre répertoire actuel plus progressif et pénétrant que d'habitude. L'essentiel de notre set sera tiré du dernier album "One Way Ride" qui sort pour Noël 2019 et qui sera disponible en vinyle et sur les plateformes digitales. Le reste de la performance proviendra de notre premier EP "Bad Luck" déjà disponible sur les plateformes digitales. Cela fait pas mal de mois que l'on contient notre énergie et je crois que c'est le moment idéal pour la libérer de la façon la plus violente possible. Le ton sera donc très hargneux et, je l'espère, au climax de notre émotion.
Milkipress : David, depuis quand es-tu entré dans l’univers musical ?
David : depuis la naissance, je crois! Ma grand-mère était Prima Donna à l'Opéra de Rome. Elle chantait encore souvent quand j'étais petit. Ce n'était pas trop mon style mais elle et mon père écoutaient énormément de musique classique à la maison et je crois que ça a eu beaucoup d'influence dans la manière dont j'aborde la musique et l'harmonie. Les compositeurs qui m'ont le plus marqué étaient Chopin, Bach, Schubert, et dans un registre plus moderne Eric Satie. Mon père a aussi toujours eu une guitare et jouait très souvent des classiques de pop italiens, français et espagnols; il nous faisait beaucoup écouter Lucio Battisti, Joan Manuel Serrat, et en français il était plutôt du genre à écouter Georges Brassens et Jacques Brel...et puis Sardou. J'avais un peu mal aux oreilles parfois, j'avoue. Je dirais que le point commun des artistes français qu'il écoutait était un certain cynisme, parfois graveleux, souvent comique. Le moment où j'ai vraiment plongé dans la musique a été lorsqu'à l'âge de 7 ans, mon père m'a offert une collection complète de 33 tours des plus grands hits des Beatles. A l'époque, la seule façon que j'avais de les écouter était un ensemble de 5 cassettes audio de 90 minutes chacune dans lesquelles j'avais réussi à tout enregistrer après que mon père m'eut montré comment utiliser son double-deck Marantz dernier cri. J'écoutais très souvent les cassettes 3, 4 et 5, celles qui contenaient les hits des albums Sgt. Peppers, Revolver, Yellow Submarine, Abbey Road, Let it Be. A huit ans je chantais toutes les paroles en yaourt, mais de façon tellement fidèle que les parents de mes amis pensaient que j'étais anglophone. Je n'écoutais que les Beatles en boucle dans mon walkman à piles rechargeables. C'était pas l'idéal, car au bout de quelques heures, la bobine de la cassette tournait moins vite et ça ralentissait le morceau. Mais j'avais pas beaucoup d'argent à dépenser en piles donc...ça donnait parfois des trucs dingues en Slow-motion.
L'année suivant, j'ai reçu ma première guitare et deux ans après, j'ai commencé la batterie. J'ai très vite enchaîné les petits groupes et les projets. J'ai tapé dessus comme un fou pendant une dizaine d'années et je me suis rendu compte que je recherchais autre chose. J'ai donc joué par la suite dans divers groupes en tant que guitariste, bassiste et chanteur choriste, pendant mes études et un peu après encore. Vers l'âge de 25 ans, j'ai commencé à écrire et à chanter en solo avec un bagage musical déjà très fourni et l'objectif de raconter quelque chose.
Milkipress : Quels sont tes grands modèles musicaux, les personnalités du rock qui t’ont inspiré ? En quoi ta musique est-elle différente de ce que l’on trouve sur la planète concerts ?
David : c'est marrant à dire, mais la première fois que j'ai écouté Axl Rose (chanteur du groupe Guns n' Roses), ça a été une révélation. C'était dans le Walkman d'un ami, qui en 1988 m'avait fait écouter "Welcome to the jungle"... et j'avais halluciné. J'ai trouvé ça énorme, l'énergie, le naturel avec lequel tout était joué ensemble, les sons, les sirènes... c'était sexy, c'était super rock'n'roll, ça respirait la rébellion...avec un certain malaise quand même. Les années qui ont suivi, j'ai plongé dans le grunge. Soundgarden, Nirvana, Pearl Jam, Alice in Chains, Sonic Youth, Stone Temple Pilots, Silverchair... Je suis un grand fan d'Eddie Vedder et de Chris Cornell depuis tout jeune. Je découvrais aussi The Cure, Depeche Mode, Red Hot Chili Peppers, AC/DC, et tous les classiques du rock des années 70s. J'adorais The Doors, groupe préféré de mon meilleur ami. J'ai toujours trouvé Jim Morrison très charismatique et ensorcelant, j'aime beaucoup son côté mystique.
J'écoutais un peu de glam rock, Mötley Crüe (en tant que batteur, j'étais fan des structures rotatives du kit de Tommy Lee), The Scorpions, un peu de thrash avec Metallica, Kreator, Sodom, mais je n'ai jamais accroché aux shredders ou aux guitar heroes. J'aime les choses assez simples dans la musique. Je préférais le blues bien rock. Jimi Hendrix, Gary Moore, Elvis,... Et pour le stoner, je crois avoir découvert les créateurs du genre, Kyuss, vers 18 ans, et j'ai adoré. C'était en même temps que Radiohead, Muse, Blur, Oasis, etc... J'aime beaucoup Thom Yorke. Je trouve qu'il a une façon magique de dire les choses.
J'ai accroché à quelques groupes de thrash/death des années 90 tels que Machine Head, Megadeth, Sepultura, et j'ai bien aimé l'arrivée des Slipknot, Gojira, Dillinger Escape Plan... La scène métal s'est étoffée avec le temps. J'écoutais aussi beaucoup de punk et de punk-rock avec The Sex Pistols, Bad brains, The Vandals, Bad Religion, NOFX, Lagwagon, etc. Ce qui m'a touché dans ces artistes, c'est la spontanéité et l'énergie qu'ils dégagent autant en studio qu'en live. Parmi tous ceux que j'ai mentionnés et qui étaient encore vivants, le seul que je n'ai pas réussi à voir fut Kurt Cobain.
Je crois que notre musique se différencie du reste parce que nous avons fait évoluer le stoner rock vers quelque chose qui n'est plus du rock, qui n'est pas du métal, ...c'est un style à part entière car il est chanté (et non guttural) et monstrueusement efficace dans sa section rythmique. Chaque morceau est écrit comme l'on écrit une histoire, avec ses personnages et la dramaturgie qui les lie. On travaille depuis le début sur tout ce qui touche à la mémoire sensorielle pour l'intégrer dans le morceau. Il y a aussi une part d'ésotérisme dans l'écriture des paroles. Je m'aide souvent des arcanes majeures du tarot de Marseille comme générateur d'idées. C'est assez efficace. On a voulu donner une âme à nos morceaux à travers tous ces outils.
Milkipress : Quand as-tu formé ton groupe ? Peux-tu nous présenter tes partenaires ?
David : j'ai formé Finger Lick en 2013, avec le bassiste du groupe, Ben. L'idée était de faire du rock avec des "c.......", qui soit plus hard que du rock, moins hard que du métal et qui soit surtout chanté, mélodieux, chargé d'émotions. Ben a une richesse musicale énorme, ce qui le rend toujours efficace et groovy dans ce qu'il fait. Il véhicule aussi ses émotions, il ressent la musique et il veut la transmettre. C'est un peu ce qui nous lie tous les quatre et ce qui fait de Finger Lick un groupe si unique; on adore jouer ensemble, juste parce que l'on transmet quelque chose, ça vient de nos tripes. Shaun et Jonas nous ont rejoint en 2018. Ils jouent ensemble depuis 10 ans dans divers groupes (Resistance, Angel Crew, Age of Torment, etc.) et on se fréquentait pas mal depuis de nombreuses années. C'est des amis de mes amis sur la scène métal bruxelloise. Jonas, notre batteur, joue entre autres pour le groupe de hardcore New-Yorkais Pro-Pain depuis 2012 et est certainement un des batteurs les plus prisés sur la scène rock et métal en Belgique. Shaun, notre guitariste, le suit dans pas mal de ses aventures et a apporté à Finger Lick une touche élégante et raffinée dans un style qui se veut sale et distorsionné.
Milkipress : S’il fallait retenir trois adjectifs pour décrire ton groupe, quels seraient-ils ?
David : authentique, puissant, sexy.
Milkipress : Pourquoi le Rock ? Quelles sont les spécificités de ce genre musical – au sens philosophique – par rapport aux autres ?
David : ce que j'aime dans la musique c'est son côté immédiat. Sur base d'un thème simple, on peut construire quelque chose de très efficace en peu de temps. C'est ce que le rock m'inspire. C'est une musique qui se veut simple dans sa façon de la jouer. La langue anglaise/américaine, source principale du rock, peut produire assez simplement des phrases chargées de sens. L'anglais peut aussi s'exprimer très facilement pour des concepts poétiques très larges, ce qui n'est pas le cas du français, je pense. L'anglais est très flexible et très direct. Le rock en anglais est par conséquent très efficace dans son message, ce qui, je crois, nous convient et nous a amené naturellement dans ce sens.
Le rock s'adresse à tout le monde. Il trouve ses origines dans les classes travailleuses de la société américaine, et apporte un vent de rébellion dans l'inconscient collectif de la société occidentale. Ca a toujours été un genre subversif et c'est peut-être aussi pour cela que ça me plaît. Quel que soit l'âge de celui qui le joue, le rock peut changer des vies à tout âge. Et ça c'est puissant.
Milkipress : Quelle charge politique et sociale peut-on trouver au travers de tes productions musicales ? Plus largement, quels messages entends-tu faire passer ?
David : il n'y en a pas beaucoup. Je crois qu'il n'y a qu'un seul morceau dans tout notre répertoire (The End) qui pourrait être catalogué de politique, mais je n'ai pas de couleur politique. En fait, je proviens d'une famille d'universitaires et d'artistes qui ont toujours été plutôt de tendance de gauche ou anarchistes, mais je n'ai jamais vraiment adhéré à l'idée de collectivité forcée et je n'ai pas aimé comment la gauche est devenue un outil de paupérisation de la société. Je suis plutôt un libéral qui veut que le système soit juste pour tous. J'ai un bac+5 en management (de la Louvain School of Management) et j'ai toujours été fasciné par la finance. Mais une sorte de fascination qui part d'un sentiment que quelque chose cloche dans les fondements du système. Je me suis intéressé à la finance monétaire. J'aime beaucoup Bernard Liétaer et les auteurs qui essaient de faire comprendre aux gens que quelle que soit notre orientation politique, il faut remettre en question les mécanismes de base de ce qui nous fait interagir entre nous - les monnaies, leur création, leur adaptation à un monde dont les ressources sont rares et périssables, et qui repose de plus en plus sur des valeurs immatérielles. Ca c'est juste mon opinion personnelle. "The End" parle un peu de tout ce qui, à mon avis, ne marche pas dans le monde, mais on essaie aussi, visuellement à travers le clip qu'on a réalisé pour ce morceau, de tourner tous ces problèmes à la dérision. On aime la bonne humeur, on n'est pas des râleurs qui veulent tout casser.
Milkipress : Quels sont tes objectifs médiatiques à moyen terme ?
David : j'aimerais recueillir un maximum de critiques (positives si possible!) sur notre prochain album, et susciter suffisamment d'intérêt dans les magazines rock en France, Allemagne et Benelux pour remplir notre calendrier 2020. La sortie du clip et de l'album se fera à Noël 2019. Les curieux pourront découvrir notre EP sur les principales plateformes digitales et les plus vintage ont déjà la possibilité de précommander un exemplaire de notre vinyle sur notre webshop https://www.fingerlick.be/shop. Une fois ce public conquis, nous avons l'ambition d'aller réveiller d'autres horizons, le reste de l'Europe et pourquoi pas outre Atlantique
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