Gilbert Cesbron (1913-1979) est un grand auteur secondaire, serions-nous tentés de croire. Ce que le public retient aujourd’hui de son œuvre, ce n’est strictement rien, sinon une infime pellicule imaginaire. Ses histoires mettent en perspective certaines grandes questions morales. Elles permettent de réfléchir en évitant le réflexe polémique reptilien. C’est par ailleurs à cela que sert la littérature : à penser les problèmes de manière plus profonde.
Gilbert Cesbron et la question de la vérité
Profondément catholique, Gilbert Cesbron offre de la vérité une définition ouverte, non exclusive.
"Qu'est-ce que la vérité? Il faut être bien mal informé ou bien partisan pour croire qu'elle est une et que chaque problème requiert une seule solution" (Ce que je crois)
Selon lui, la vérité pourrait s’accorder au pluriel, sans pour autant qu’il soit question de relativisme. La ligne de crête semble ténue, d’où l’importance de l’éclairage moral lorsque l’on se frotte aux grandes questions sociétales.
Gilbert Cesbron nous met aussi en garde contre le bon sens commun, la rationalité à courte vue qui domine nos raisonnements quotidiens :
"Le cœur a souvent pour mission de nier l'évidence" (Ce que je crois)
L’évidence, nous murmure-t-il, ne suffit pas à la compréhension du monde. Il faut chercher au-dessus d’elle.
Gilbert Cesbron, la religion et Dieu
C’est une affaire entendue : en matière de religion, la littérature risque souvent sa peau. Tenter d’édifier le lecteur par l’entremise de trames imaginaires s’avère généralement pathétique et ridicule. Cela, Gilbert Cesbron le sait et n’entend pas tomber dans la facilité. La démarche littéraire exige autre chose, de plus indépendant, de carrément hérétique : créer un monde avec ses propres ressources.
"Le Christ ne se démontre pas, il se rayonne" (Ce que je crois)
On pourrait trouver aux romans de Gilbert Cesbron quelques renflures spirituelles ou de méchantes taches d’eau bénite. Certes. Ses œuvres sont intellectuellement plus denses et nourrissantes qu’il n’y paraît de prime abord.
Avant Dieu, Gilbert Cesbron cherche à nous présenter ce que signifie philosophiquement le mot "humain". C’est là que ses convictions chrétiennes lui deviennent particulièrement utiles.
"Ce qui est viril c'est la fidélité, pas la chiennerie" (Ce que je crois)
Gilbert Cesbron, un apologète discret
Loin des coups de bélier de la scolastique néothomiste, Gilbert Cesbron a su proposer sa foi sans cet orgueil poissard des gens d’Eglise suprémacistes (désolé pour le terme anachronique…). Pour autant, notre auteur savait être sévère envers le monde laïcisé :
"La fraternité républicaine, elle est bien peu de chose à côté de l’amour chrétien" (Interview INA, 19 août 1971)
"Pour en revenir aux athées, il me semble parfois que plus ils sont "humanistes" et plus ils mettent une sorte de rage à nier Dieu: comme s'ils pressentaient que, s'ils ne le réfutent pas entièrement, il finira par être le plus fort" (Ce que je crois)
Pierre-André Bizien
Pour aller plus loin
Interview de Gilbert Cesbron (archive INA)
Quelques œuvres importantes de Gilbert Cesbron :
Chiens perdus sans collier (1954)
Les saints vont en enfer (1952)
Il est plus tard que tu ne penses (1958)
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