Un soir lors d’un repas partagé, l’ami avec qui j’étais me posa à brûle pourpoint cette question : « Qui est Jésus pour toi ? ». Sur le coup, je ne fis pas attention mais j’ai ensuite réfléchi à ce genre de curiosité, et je me suis dit que ce n’était pas innocent. En effet, beaucoup de gens dans notre monde se posent des questions sur la vie, la mort, le devenir, les grands personnages, et Jésus fait partie de ce panthéon de « grands hommes » qui sont classés parmi les « sages » de l’humanité... on pense à Mahomet, Bouddha…
Un écrivain, Frédéric Lenoir, a même écrit un intéressant ouvrage sur la question : « Socrate, Jésus, Bouddha ». Il faut se réjouir, certes, mais en même temps le chrétien que je suis éprouve toujours un petit pincement au cœur : ramener Jésus au rang des prophètes ou des sages célèbres de l’humanité, n’est-ce pas quelque part le dévaluer et en faire un personnage parmi d’autres ?
La tentation qui taraude nos contemporains est bien celle-ci : faire de Jésus un « surhomme », mais néanmoins n’en faire qu’un homme. Je comprends très bien que pour des millions d’athées ou pour des agnostiques, comparer Jésus, le Christ, à Dieu, c’est grotesque… Encore veut-on bien le placer dans le panthéon des grands hommes, mais prétendre qu’il est ressuscité… Allons ! Avouez que je suis un peu culotté de vous dire de telles choses, vous qui me lisez, scientifiques, rationnels, incroyants. Pourtant c’est ce que les chrétiens affirment et ce que les missionnaires de tout poil continuent à propager à travers le monde. Alors, faut-il les faire taire au nom de la Raison, ou bien laisser ces pauvres illuminés continuer à propager des rêves ? L’Opium du peuple n’est pas loin !
Pourtant la question n’est pas nouvelle. Si vous relisez les Actes des Apôtres, vous trouverez au chapitre 17, versets 21 et suivants, le discours de Paul à propos du dieu inconnu. Rappelez-vous : Les Athéniens, gens croyants mais tolérants, avaient dressé au milieu de l’aréopage un autel parmi tous les autres : il était consacré « Au dieu inconnu ». Ils se disaient « si par malheur, nous en avions oublié un, il pourrait être mécontent, ne froissons personne… ! » Paul part de ce présupposé, pour parler très indirectement du Dieu de Jésus Christ ; les gens l’écoutent, intéressés et polis, mais lorsqu’il aborde la question de la Résurrection, alors ils éclatent de rire : comment un homme pourrait-il naître à nouveau ? Comment un homme mort peut-il revivre ? On croit bien en l’immortalité de l’âme et on veut bien accepter un autre dieu, mais croire qu’un homme de chair et de sang puisse ressusciter, et en plus qu’il soit Dieu… Non, c’est trop… !
Les Apôtres qui n’étaient au départ que de frustres pécheurs des bords du lac de Tibériade ont été fascinés par Jésus. Il fallait que celui-ci ait de sacrés dons de persuasion pour que ces hommes abandonnent là leurs filets et le suivent….jusqu’à la mort. (Voir dans les Evangiles tout ce qui a trait à la vocation des Apôtres).
Or, c’est encore la question que posent nos contemporains. Comment un homme peut-il naître de nouveau ? Les connaissances scientifiques ont totalement submergé le monde contemporain. « Je ne crois que ce que je vois »…Comment faire comprendre qu’il y a deux réalités et qu’elles ne peuvent s’opposer- La science et la Foi ? C’est sans doute là le paradoxe de notre société. Ce qui paraissait comme une évidence autrefois ne l’est plus… On ne peut mélanger ces deux choses, elles ne sont pas antinomiques mais complémentaires. La science est de l’ordre de la connaissance, la Foi est un don… Cherche et tu trouveras. L’Amour que je porte à ma mère, à ma femme ou à un être cher, est-il quantifiable ? Est-il visible ? Et pourtant n’est-il pas bien réel ? L’Amour, souvent, fait faire les choses les plus déraisonnables, humainement parlant. Alors, ne portons donc pas de jugements sur ceux qui ont pu rencontrer Jésus, le Christ.
Voilà pourquoi mon interlocuteur, curieux, m’a posé cette question : « Pour toi, qui est le Christ ? ». Mon ami est croyant mais il se pose des questions, et il a bien raison ! Il vit dans un monde où l’on se moque parfois gentiment, parfois cruellement, de ceux qui croient en Dieu. Il est de bon ton d’afficher une incroyance qui vous place d’emblée parmi les gens libérés…Un croyant ne peut être qu’un demeuré…ou un tenant de « l’obscurantisme », comme on disait autrefois.
Alors, affirmer que pour moi Jésus-Christ est le Vivant… Qu’Il est entré dans ma vie, qu’il donne un sens à tout ce que je fais, et que je ne peux vivre sans lui. Qu’il est bien difficile de communiquer cette expérience. Ce n’est pas seulement son enseignement que je reconnais, et que j’essaie d’appliquer, c’est aussi Celui qui est ressuscité et qui me donne l’espérance de la Résurrection. Croyez-vous que cela peut avoir un sens ?
J’admire le monde de l’Islam, je sais que des millions de croyants vénèrent le Dieu Unique et qu’ils le prient plusieurs fois par jour. Certaines personnes, baptisées dans leur enfance, n’ont pas compris que Dieu venu sur terre nous avait délivré un Message de Libération, et qu’il y avait une relation très grande entre le monde créé et Dieu. Celui-ci s’est incarné pour donner sens au monde et à notre vie. Que ce Dieu, présent dans notre vie avait voulu se faire si proche qu’Il était encore présent, « familier » parmi nous. Pourtant c’est cette Présence que je vis chaque jour et que j’essaie bien malhabilement de vous communiquer.
Je ne pourrais pas renier ce Dieu de Jésus-Christ pour un Dieu éternel mais lointain. Comment pourrais-je renier cet homme-Dieu ? Vous savez, pour moi c’est une longue pratique, une longue familiarité, vous connaissez le joli conte du Petit Prince : « Dis apprivoise-moi »… Il faut du temps pour inclure une personne comme Jésus-Christ dans notre vie. Il n’est pas gênant, sachez le bien, il ne viendra pas vous empêcher de vivre, d’avoir des projets. Il sera toujours un compagnon attentif, qui saura au bon moment vous aider à réfléchir, et à vous redonner espoir si besoin.
Bernard Vignot
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